mercredi 10 décembre 2008

Web collaboratif : application de la responsabilité éditoriale (suite)

Mise en œuvre

Une affaire Scouts d'Europe[1] fournit une illustration de la mise en œuvre de cette responsabilité dans le cadre d’un forum de discussion.

En l’espèce un site contient un livre d’or, semblable dans son mode de fonctionnement à un forum puisqu’il permet à des participants de laisser des messages accessibles à tous.
Une modération existe et s’effectue chaque semaine à posteriori.
Des messages critiquant la partie civile et faisant une analogie de cette dernière avec les nazis sont postés.
La partie civile engage une action sur le fondement de la diffamation et de l’injure publique.
Pour motiver sont jugement le TGI vise clairement la loi de 1881 mais ne fait pas mention de l’exigence d’une fixation préalable qui est absente en l’espèce du fait d’une modération à posteriori.
Le tribunal reconnaît les faits et condamne les responsables en tant que producteurs à une amende de 1000 € avec sursis et de 0, 15 € de dommages et intérêts au civil.
La condamnation est donc légère mais les exploitants sont néanmoins tenus pour responsables des messages au motif que "[les créateurs du livre d'or] (...) en offrant d'héberger sur leur site, de manière anonyme, toute personne qui le désirait, avaient l'obligation de vérifier très régulièrement le contenu des messages inscrits et de supprimer immédiatement tous les propos qui seraient contraires aux droits de tiers. Faute d'avoir pris des mesures adaptées, ils ont permis que soient inscrites des affirmations diffamatoires et injurieuses qui étaient accessibles à toute personne venant se connecter sur leur site.
Il convient donc de les déclarer responsables de toutes les informations diffusées sur ce site"

Il s’agit donc ici d’une responsabilité pour risque qui oblige le prestataire à prendre « toutes les mesures adaptées » pour éviter un dommage.
Le tribunal semble poser une obligation de modération « régulière » à la charge de l’exploitant et insiste sur le fait que cette obligation découle du fait que les contributions se font dans l’anonymat.

Ainsi force est de constater, en reprenant les différentes décisions de justice que des faits semblants similaires, à savoir l’émission de messages diffamatoires sur des forums de discussion, peuvent être soumis au régime de responsabilité des hébergeurs ou au contraire donner lieu à réparation sur le fondement de la loi de 1881.
Certains arrêts condamnent également les prestataires sur le fondement de la responsabilité de droit commun.
Ce que l’on peut remarquer en revanche est que le régime le plus favorable a été appliqué à l’exploitant qui a fait le plus preuve de diligence en établissant une charte claire et en retirant immédiatement les messages (Boursorama)
A contrario la condamnation la plus lourde (Père-Noël) intervient à l’encontre du prestataire qui a montré le plus de mauvaise volonté, allant jusqu'à initier certains messages et ne retirant pas les messages litigieux.
Malgré tout il est difficile de tirer des critères objectifs de la jurisprudence, c’est pourquoi le FDI propose aux juges des critères prédéfinis pour l’application de la responsabilité en matière de délit de presse.
[1] TGI Rennes, 27 mai 2002, Association des guides et Scouts d'Europe c/ X. et Y. (aff. Scouts d'Europe)
http://www.foruminternet.org/documents/jurisprudence/lire.phtml?id=582

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